Me Caroline Rhéaume, Avocate, M.fisc., TEP

Le mandat en prévision de l’inaptitude : un must pour les athlètes pratiquant un sport de combat

Un jeune boxeur mexicain est décédé le 22 octobre 2013 après avoir subi de sévères blessures à la tête lors d’un combat présenté au Mexique.  L’athlète s’est retrouvé dans le coma et n’a malheureusement pas survécu à ses blessures. Un autre incident du genre est survenu au début du mois de novembre 2013. Le boxeur est sorti du coma récemment, mais les médecins ne savent toujours pas s’il conservera des séquelles importantes de ses blessures. Sa carrière de boxeur semble toutefois terminée.

Au Québec, si un athlète perdait ses capacités mentales de façon temporaire ou permanente et qu’il n’avait pas rédigé un mandat en prévision de son inaptitude, il faudrait ouvrir un régime de protection au bénéfice de cette personne. Si l’inaptitude est temporaire ou partielle, un tuteur est nommé. Lorsque l’inaptitude est totale et permanente, il s’agira plutôt d’un curateur.

Un conseiller au majeur peut être nommé lorsqu’une personne adulte démontre une incapacité légère à gérer ses biens.

En présence d’un enfant mineur, le régime de la tutelle entre en jeu.

Ouverture d’un régime de protection

Si une personne majeure inapte n’a pas rédigé de mandat en prévision de son inaptitude, il faut faire une demande d’ouverture d’un régime de protection pour cette personne. Une demande à cet effet doit être adressée à un greffier ou à un juge de la Cour Supérieure.  La requête doit de plus être signifiée à la personne majeure à protéger, à un membre de sa famille et au curateur public. Il y a ensuite interrogatoire de la personne majeure ayant besoin de protection. Une assemblée de parents et d’amis est par la suite convoquée afin de choisir la personne qui agira à titre de représentant de la personne inapte.   Trois personnes seront généralement nommées par le tribunal et formeront le conseil de tutelle. Un tuteur ou curateur sera nommé afin de représenter la personne inapte, ainsi qu’un remplaçant.  Le conseil de tutelle veille à ce que le tuteur ou curateur accomplisse sa tâche et prenne les bonnes décisions. Le curateur public a un certain droit de regard sur l’administration du tuteur ou curateur.

S’il est impossible de trouver une personne pour représenter la personne inapte, le curateur public pourra être nommé.

Une fois le tuteur ou curateur en poste, cette personne verra à administrer les biens de la personne inapte et à prendre des décisions en matière de soins médicaux et lieu d’hébergement. Il faut toutefois noter que si la personne inapte a un conjoint ou des enfants à charge, ceux-ci n’auront plus accès aux ressources financières de la personne inapte.  Cela peut être problématique si l’athlète subvenait en tout ou en partie aux besoins du conjoint et/ou de ses enfants.

Rédaction d’un mandat en prévision de l’inaptitude

Certes, les athlètes qui pratiquent des sports comme la boxe ou les arts martiaux mixtes sont conscients qu’ils prennent des risques chaque fois qu’ils montent dans l’arène ou l’octogone, voire même lors des séances d’entraînement.

Malheureusement, bien des athlètes ne voient pas l’avantage de rédiger un mandat en prévision de leur inaptitude s’ils ne possèdent pas d’actifs de grande valeur. Or, ils oublient que le mandat sert également à protéger leur intégrité physique.  Le tuteur ou curateur entre dans les souliers de l’athlète inapte. Il paie les dépenses courantes, perçoit ses revenus, gère ses comptes de banque et placements, voit au paiement de ses dettes, mais il prend également des décisions qui touchent ses besoins quotidiens et les soins requis par son état de santé.

En rédigeant un mandat en prévision de l’inaptitude, l’athlète choisi à l’avance son représentant et peut lui donner des directives particulières.  Veut-il éviter tout acharnement thérapeutique ? Veut-il que ses revenus et ses actifs puissent être utilisés au bénéfice de son conjoint ou de ses enfants, dans la mesure où il reçoit les soins appropriés ? Veut-il nommer une personne pour gérer ses actifs et une autre pour s’occuper de sa personne ?

Le mandat peut être rédigé sur mesure. Alors, pourquoi ne pas saisir la chance de dicter ses souhaits et directives dans un mandat en prévision de l’inaptitude plutôt que de laisser la gestion de ses biens et la protection de sa personne en partie au hasard ?

Évidemment, la preuve de l’inaptitude doit être faite avant que le mandat ne soit homologué.  Ceci s’effectue par le biais d’évaluations médicales et psychosociales.

Que se passe-t-il durant la période qui précède l’homologation ?

Comme l’homologation du mandat peut prendre un certain temps, il est recommandé de prévoir dans le mandat une clause octroyant au mandataire les pouvoirs prévus audit mandat, comme si ces pouvoirs étaient prévus dans une procuration.  Le mandataire peut alors généralement représenter la personne inapte durant la période intérimaire. Notons qu’une procuration entre en vigueur dès sa signature, alors que le mandat doit être homologué pour être applicable.

Conclusion

Évidemment, les coups à la tête et les commotions cérébrales ne guettent pas seulement les athlètes pratiquant des sports de combat.  Tout individu est à risque de perdre ses capacités mentales suite à une maladie ou un accident. Et cela n’arrive pas seulement à un âge avancé.

Il est donc important pour les athlètes de protéger leurs actifs, mais surtout leur intégrité physique, alors qu’ils ont la capacité pour le faire.

Me Caroline Rhéaume, avocate, M.fisc., TEP

Décembre 2013

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